In the Clouds, We are free [PV]

Musique qu'il mixe

La musique sonnait dans ses oreilles. Le casque bien enfoncé sur son crâne - j'ai besoin de clarté - pour pouvoir dessiner les prochains arrangements. Pour rendre la musique mémorable. C'était un morceau qu'il allait revendre à un label pour rejoindre une compilation de plusieurs artistes. Cela payait convenablement, mais ce n'était pas ce qui lui faisait payer son toit. Ça, c'était le rôle de ses hacking mais aussi des soirées qu'il animait en tant que Dj. Il commençait à être bien payé d'ailleurs, se faisant remarquer dans la masse des autres mixeurs. Il composait ses propres musiques en plus, même s'il n'avait aucune voix à y glisser pour le moment. Peut-être à un moment il entendra une voix qui lui plaira. Peut-être qu'il pourrait créer des titres originaux, avec des chanteurs différents. Des idées qui passaient. Il se concentrait. Installé dans un coin du Palais des Roses. Un salon de thé où il aimait venir se glisser pour le wifi excellent, mais aussi pour les cafés viennois dont il raffolait. Précieux mélange de café lait et d'une bonne rasade de crème chantilly. Un péché gourmand. Il avait le bec sucré. C'était un fait. C'était mieux que de s'envoyer en l'air avec la dernière drogue à la mode. En pleine journée ça craignait. Il avait besoin de garder l'esprit vif de toutes les façons, et il n'aimait pas les drogues qui faisaient speeder. C'était dangereux pour lui.

Il avait son pc face à lui et il y pianotait pour ajouter un effet, monter les basses, mettre en avant le piano. Il fronçait les sourcil sans réellement s'en rendre compte. Dans ces moments-là plus rien existait. Il ne calculait pas son téléphone sur la table aussi qui n'arrêtait pas de vibrer et de bouger par la même occasion. Ce qui comptait c'était le son. Un vestige d'un ancien café trônait au milieu de la table. Cela faisait deux heures qu'il était là et il avait déjà perdu la notion du temps. Il pourrait se commander autre chose. Son regard avait longtemps hésité avec un cheesecake à la framboise. Son attention revenait à son logiciel de création musicale. Il savait qu'Isaure allait bien mieux. Il avait tenu à avoir de ses nouvelles au fil des jours qui ont précédé sa dernière visite. Il savait que son frère traînait à Chicago et il se devait de le contacter pour savoir ce que le concile tramait. Avoir ses proches qui se faisaient posséder, ça ne sentait pas bon. Mais pour le moment il n'en avait donc que pour ce morceau qu'il avait pratiquement fini. Ici il fignolait, il réécoutait, allant jusqu'à se laisser aller sur la banquette, le visage tourné vers le plafond tandis que ses yeux se fermaient. Son pied battait naturellement la mesure, tandis qu'un sourire commençait enfin à percer à travers ses lèvres. C'était parfait ainsi.

Ses yeux d'un bleu saisissant s'ouvrir à cet instant et il te vit, la musique encore dans ses oreilles. Il t'avait déjà remarqué. Ton visage lui rappelait quelqu'un...la douceur de ton regard l'avait marqué entre autre chose. Constatant que tu déposais un nouveau café viennois à sa table, il fit glisser le casque de ses oreilles et ses yeux se froncèrent légèrement d'incompréhension. «Je n'ai pas commandé ça...tu dois faire erreur...» Il tapa prestement sur une touche pour que la musique cesse de tourner. Il porta ses bras tatoués, tout comme un bout de son cou, sur la table, son visage venant se poser entre ses mains parées de bagues. «On ne s'est pas déjà vu?» Sincèrement il n'était pas entrain de te draguer - ce serait une approche tellement basique - mais il ne t'en voudrait pas si tu le pensais. Avant d'attraper le verre, il attendait de savoir qu'il lui était bien concerné.

À ton sourire, il se mit à sourire aussi. C'est qu'il avait oublié. Trop absorbé par son travail qu'il venait à peine de finaliser. Non. Il devra repasser dessus. Juste pour être certain. Perfectionniste. Il l'était. Obsessif. Aussi. L'un pour le travail. L'autre pour les relations. Il était bien souvent trop. Ou pas assez. Il avait du mal avec la modération. Sauf quand il se perdait sur la peau d'un amant. Un cadeau? Il arqua un sourcil tandis que son sourire s'agrandit... «Que me vaut l'honneur?» Il nota que tu gardais tes distances. Peut-être car tu étais à ton travail et que tu n'avais pas l'habitude de prendre des largesses de tutoiement comme lui le faisait. Il avait du mal avec les protocoles. Il avait du mal avec les cadres. Son père lui disait pourtant que cela lui ferait du bien de se stabiliser. Alors lui continuait de fuir, de risquer sa vie...une façon de vivre comme une autre à ses yeux. Du suicide déguisé pour d'autres. Il se saisit de la tasse que tu lui glissais. «Je ne me lasserai jamais de ce genre d'attention.» T'avais retenu ses goûts et puis...des attentions de ta part, il pourrait en aimer beaucoup d'autres. Mais pour le moment, il reste assez neutre dans sa posture à ton encontre. Il ne comprend pas vraiment ce qui t'a donné l'envie de l'approcher. Vu sa dégaine, pas mal de monde préférait l'éviter. Ce n'était pas comme s'il était le gars le plus souriant au monde non plus.

Finalement, il comprend que l'impression de déjà vu est partagée. Sourire. En miroir au tien quand tu parles de technique de drague au rabais. «J'avoue que j'ai pensé la même chose.» Il aimait voir ces étincelles de joie dans ton regard chocolat. Il aimait cette chaleur qui s'en dégageait. Il te serra la main d'une poigne ferme. «Ruben.» Ton prénom ne lui indiquait rien...«Écoute...je travaille beaucoup en boîte, notamment au Nightbird ou au Red Velvet...j'anime les soirées alors peut-être que t'as simplement dansé sur la piste et mon cerveau a décidé de se rappeler de toi parce-que...» Spontané. Il venait de s'auto-piéger lui-même, mais décida de poursuivre, son expression se fermant légèrement dans le même temps comme pour se protéger. «Parce-que t'es cute.» Rectification. Parce-que t'es à son goût surtout. Mais n'étant pas un dragueur, il préférait faire passer les choses ainsi. Son explication lui paraissait assez plausible à dire vrai. «Ça fait longtemps que tu bosses ici? J'avoue t'avoir remarqué que depuis peu...» Changer de sujet, du moins en partie, c'était ce qu'il y avait de mieux à faire. Il se saisit de sa cuillère et attrapa un peu de chantilly qu'il savoura avec un plaisir manifeste. «La chantilly maison...s'il y a bien un truc que je voudrais bien apprendre à faire en cuisine, ce serait bien ça.» Sachant qu'il n'était pas vraiment doué en ce domaine, sauf quand il s'agissait de plats de restes...ou encore de sauce. Oui, un talent comme un autre que lui lançaient en taquinant ses amis.

«T'as fini ton shift? Je voudrais pas que tu te fasses réprimander à cause de moi non plus.» Même si sur le coup, il était plutôt ravi que tu sois venu le trouver. Rester concentré trop longtemps, couper du reste du monde ne lui faisait jamais totalement du bien. De plus, il n'osait pas trop te poser de question pour le moment, juste sensible au fait que tu sois venu l'aborder et en attente de savoir si t'avais tout ton temps ou pas.

À dire la vérité, Ruben n'était pas habitué à ce qu'on l'approche de jour. Habituellement c'était plus des regards, des gestes, mais jamais de mots ou rarement. Ou plus tard. Même s'il n'en laissait pas grand chose paraître, il ne savait pas vraiment comment se comporter face à un homme qui lui plaisait et qui se montrait aussi attentionné. Ça le touchait. Pour beaucoup c'était que dalle. Pas pour lui qui venait d'une famille froide en affection et compliment. Il fallait qu'il soit le meilleur en tout. Il l'est devenu en bien des domaines mais pas ceux qui comptaient pour son père. Alors les compliments, l'affection, il ne connaissait pas. Tu lui offrais là plus qu'un simple café, et sans doute d'autres à venir à tes mots. «Ou je pourrais aussi t'offrir un verre à l'occasion.» Proposer pour ne plus recevoir. Parce-que même si ça lui faisait plaisir, il ne saurait à terme comment y réagir. Peut-on être généreux sans arrière pensée? Il avait du mal à y croire. Dans son monde c'était donnant-donnant. Ce n'était pas triste, c'était sa réalité. Mais chez toi il distinguait qu'une autre pouvait exister. Enfin il ne savait pas - t'es différent - et c'était attirant en grande partie - même si je détruis tout ce que je touche - et que ses yeux ne savaient pas encore comment te partager tout ça.

Son sourire rayonna à nouveau en t'entendant rire suite à sa fin de phrase. Touché. T'avais perçu qu'il voulait dire autre chose. Pas grave. Il assumait, surtout que t'étais pas en reste côté compliment. Toutefois, à ton "charmant" il se passa une main dans sa tignasse brune, avant de te glisser: «Charmant? C'est pas trop le mot qu'on emploie pour moi habituellement.» Tu lui apparaissais comme sûr de toi et en même temps il sentait un genre de réserve...C'était plaisant, mais il se demandait d'où ça te venait. «C'est à cause de ton travail que tu continues de me vouvoyer?» Besoin de savoir. Il n'était qu'impulsion à dire la vérité. Les mots allaient parfois trop vite, trop fort. Étrangement il espérait ne pas te faire fuir. Parce-que tu le voyais en pleine lumière et que tu n'avais pas peur. Parce-que quelque chose dans ta voix lui plaisait, même s'il ne pouvait encore déterminer quoi. Il savait écouter. Il finit de manger la chantilly en t'entendant parler de reprendre les cours. «En quel domaine?» Il ne se sentait pas envahi que tu lui parles de ta vie. À dire vrai il en était curieux à cet instant.

Il remarqua ton sourire quand il parla de la chantilly. Il ne se doutait pas que c'était car tu l'avais préparé, continuant à remarquer comme il appréciait les traits de ton visage. Il avait cru percevoir une légère gêne aussi, et se demanda encore si t'allait finir par le fuir en prétextant avoir mieux à faire. Ruben n'était pas le plus doué pour les conversations...Il ne savait jamais vraiment ce qu'il pouvait partager ou demander. Mais au moins sa curiosité l'amenait à poursuivre le contact en règle générale. C'est là que tu lui annonças avoir bientôt terminé ta journée. Cela le ramena à la sienne et naturellement il lança. «10 minutes hein...Je crois que je peux les utiliser pour terminer cette musique et ensuite...» Son regard azurin vint dénicher la profondeur des tiens. «On peut traîner ensemble? Ici ou ailleurs...Je peux même te faire écouter mon morceau si tu veux?» Il lança un regard en direction de ton collègue que tu venais de saluer du visage, avant de revenir t'observer avec une certaine douceur qui ne perçait de lui que lorsqu'il commençait à être vraiment sous le charme.

Pourquoi pas? C'était une réponse prudente. Ruben ne s'en formalisa pas. Il n'était pas doué là-dessus. Inviter pour discuter...ça se faisait naturellement après le sexe, pas vraiment avant dans son cas. Il ne se reconnaissait pas trop à dire vrai. C'était grisant - je me sens bête - parce-qu'il adorait ce qui pouvait le surprendre. Juste en lui ayant apporté un café tu venais d'un peu fissurer son monde. Pas de peur. Vraiment de l'envie. T'avais le gestes mesurés. Calmes. Rien à voir avec la pile électrique qu'il pouvait parfois être. Pour le moment ça ne se distinguait pas. L'immobilité il connaissait assez bien. Par contre tu le pris de court à nouveau. T'insistais. T'as raison de le faire. C'est le genre de truc qui ne rentrent pas en lui habituellement. Mais là il ne sait pas. Ses yeux brillent comme deux turquoises et il décide de te croire. Plaisant ça passe. Il comprend que t'es sensible à son charme. Il ne peut s'empêcher d'en rajouter: «Ça c'est car tu me vois entrain de bosser de jour.» Plus calme dans ces moments-là. La concentration ça le prenait aux tripes et ça le faisait rester à sa place. Rien à voir avec les soirées endiablées que ce soit en boîte ou dans une bagnole. «J'aime aussi ce qui se dégage de toi.» Il se surprend lui-même en prenant ce ton plus sérieux. Il ne plaisante jamais quand il s'agissait de parler de ce qu'il ressent. Avec toi c'est fluide. Perturbant. Il décide d'aimer ça.

Pour le reste, il comprenait que c'était bien ton métier. Il préférait t'entendre le tutoyer. Il avait envie d'être proche de toi - je ne peux pas m'en empêcher - et tu ne sembles pas t'y opposer. Les arts. Son regard s'allume. Ton univers a l'air vaste. Ça lui donne envie d'y glisser une main, comme il le ferait dans l'océan. «Me dis pas que t'es du genre timide avec ta musique? Bien que je conçois qu'on puisse l'être.» Il l'a été pendant toute son adolescence avant d'avoir besoin de faire danser la foule, d'extérioriser ses émotions qui l'emplissaient et commençaient à l'étouffer...C'était encore le cas aujourd'hui. Vous étiez tous deux partis dans vos pensées au même moment, revenant ensemble tandis qu'il venait te proposer de continuer à partager du temps ensemble. À tes paroles il commençait à acquiescer de la tête. Rester ici lui allait bien, et il t'offrit un léger sourire au moment où tu dus t'éclipser. Ruben laissa son regard te suivre, avant de ravaler un sourire presque idiot. Il ne comprenait pas trop pourquoi il se sentait si heureux de t'avoir rencontré. Il remit son casque, et réécouta une énième fois le morceau. Il allait réécouter une dernière fois - n'ayant eu au final qu'une affaire à moduler - il sentit ta présence, leva les yeux vers toi et retira son casque au moment où tu venais préciser que cela avait été plus rapide que prévu.

Pendant quelques secondes Ruben sembla absent. Il te contemplait, mais aucun moyen de savoir si tu le dérangeais, s'il te voyait réellement..ce qu'il pouvait bien penser. Quand ses yeux croisèrent les tiens il sembla se ressaisir. «Excuse moi! C'est parfait, t'as qu'à venir à côté de moi pour écouter, ce sera plus simple....» Il se décala un peu, pas gêné de faire écouter son travail...Non, ce qui venait le rendre pratiquement muet était qu'il trouvait que tu avais un certain charisme. Ce truc qui lui donnait le goût de venir passer ses doigts dans tes cheveux et t'embrasser. Une envie soudaine, juste parce-qu'il te découvrait hors de ta tenue de travail. Il ne put s'empêcher d'ajouter tandis que tu t'installais: «J'adore quand tu portes tes cheveux comme ça.» À savoir lâchés. Son regard flirta un instant dans le tien, avant qu'il ne se reprenne, attrapant le casque et venant te le positionner sur la tête. Automatiquement, tu fus coupé des bruits ambiants...c'est après un nouveau regard et un pouce levé, pour savoir si tout était ok pour toi, qu'il enclencha la musique sans même t'avoir encore dit à quel dessein elle avait été créée. Pendant que tu écoutais, il croisa ses bras et se cala dans la banquette, son regard captivé par la bande son qui défilai au sein du logiciel.

Beaucoup de choses se passaient au-delà de vos regards. Au-delà de ce qui était apparent. Quelque part vous vous retrouviez dans cette non-habitude de recevoir des compliments. Toi par l'absence de sincérité de certains trop intéressés, lui car il ne savait pas vraiment qu'en penser. Il avait toujours eu du mal avec son physique, le cachant sous d'innombrables tatouages que plusieurs de ses amants aimaient à contempler. Ça détournait ainsi leur attention de ce corps qu'il avait su muscler avec les années, mais plus en prenant des risques, non pas en allant à la salle de gym. Il ne savait pas trop ce qu'il dégageait, mais il voulait comprendre que c'était quelque chose au-delà du physique qui te plaisait en lui et pour le moment c'était bien suffisant. Tout comme il accueillit d'un hochement de tête le fait que tu lui annonces ne pas avoir l'occasion de jouer devant un public. «Je serai curieux de t'écouter...enfin si tu voudras bien.» Cette demande entendait que vous vous revoyez. Que ce ne soit pas qu'un simple échange au salon, ou peu importe où. Il aimait réellement cette éventualité. Il voulait la voir se concrétiser. Il avait envie de pouvoir te regarder à nouveau.

Quand tu es revenu changé, Ruben se demanda un instant s'il n'avait pas merdé. Ça lui arrivait parfois ces absences qui n'en étaient pas vraiment. Il se voyait juste absorbé par un détail, une sensation comme ici au point de perdre présence. Heureusement qu'il avait su revenir à lui à temps, car il s'en serait voulu de te blesser, et de te voir partir. D'ailleurs, il fut étonné quand tu vins t'asseoir auprès de lui de sentir pour la première fois une certaine gêne chez toi. Pourtant les marqueurs semblaient évidents. Il avait compris qu'il te plaisait et il ne s'était pas caché de l'inverse...il ne comprenait pas en quoi ses mots étaient de trop. Il essayerait de se retenir les autres fois. Pour ça, il allait éviter de t'observer tandis que tu écoutais sa musique. Il valait mieux qu'il reste concentré sur l'écran. Quand il était professionnel il faisait moins de bourde, et là il considérait qu'il en avait assez fait. Tu l'avais bien remercié, mais il n'arrivait pas à s'extraire de cette sensation qu'il aurait peut-être du se taire. La musique avait commencé depuis deux minutes. Le suédois posa pour la première fois à nouveau les yeux sur toi. Sans s'en rendre compte, il se mordit la lèvre inférieure tandis qu'il contemplait ton visage serein, les yeux fermés, ton doigt tapant la mesure. Ses lippes s'étirèrent en un doux sourire. T'aimais. Il en avait la certitude et ça lui provoquait de la chaleur dans la poitrine. Le morceau continuait à défiler et il ne se lassait pas de t'observer, encore pris par cette attraction que tu opérais sur lui.

Au final le morceau se termina. Il s'était tourné de trois quart de façon à pouvoir mieux t'observer, te laissant revenir à ton rythme. Mû par une certaine impatience, il avait porté son pouce à ses lèvres, passant l'arrière de ce dernier sur sa lèvre inférieure en attendant de croiser à nouveau ton regard. «Alors? C'est ton genre ou bien?» Après tout tu pouvais détester l'électro...il avait eu des ex comme ça. Après avoir reçu tes retours, il enchaîna de façon plus technique. «Je pourrais encore jouer sur la réverbération, mais je pense que je vais arrêter de pinailler...Je dois rendre ça demain. C'est pour l'album d'un label où ils incluent plusieurs DJ...Je ne sais comment ils ont eu mon nom..la magie de ce domaine.» Quand t'es bon, les gens se mettent à parler de toi, et on ne peut jamais savoir qui connait qui. «Je pourrai te faire écouter d'autres compo si tu veux...Ou alors je te verrai peut-être venir danser tandis que j'anime une soirée.» Il n'arrivait pas à se souvenir s'il t'avait vu danser au Velvet ou ailleurs. Son regard pouvait parfois être perturbant, il en avait conscience. Sauf dans les moments comme celui-ci où le silence s'installait doucement et qu'il ne pouvait s'empêcher de fixer tes yeux...Au final, il détourna le regard pour se fixer sur l'écran. Après un enregistrement, il quitta le logiciel et se mit à remballer la bête. «Tu vis à Chicago depuis longtemps en fait? Quelque chose me dit que t'es pas natif d'ici.» Tout comme lui au final. Il le notait sur quelques expressions, tout comme lui-même gardait un accent particulier même si non flagrant.

Tu le marquais bien plus qu'il ne pouvait l'admettre à cet instant. Cette façon qu'il avait de te fixer, se perdant sur le moindre détail de ton visage en était une preuve manifeste. Mais ce qui changeait réellement de d'habitude, était que les choses ne pouvaient se passer rapidement - ce serait tout gâcher - vous appreniez à vous connaître, d'une façon un peu hésitante au final, mais l'intérêt était réel. Malgré le fait qu'il sentait être attiré par toi, il n'avait pas pour objectif de te mettre dans son lit. Il n'avait jamais cet objectif d'ailleurs. C'est juste que les mondes qu'il fréquentait fonctionnait ainsi, et gare à celui qui imaginait trouver autre chose que des bras chauds pour la nuit. Il en était lui-même une représentation, du gars qui prenait et avec qui on ne pouvait espérer quoi que ce soit d'autre. Pas que ses amants aient essayé fallait dire...Mais les affaires de sentiments ce n'était jamais simple alors il s'en préservait quelque part. Personne n'aimait avoir à faire à sa jalousie ou encore à sa passion dévorante. Mais de ça tu ne pouvais te douter à cet instant précis. Vous n'en étiez pas là. Sans doute n'y viendrez-vous jamais. Il s'en préservait, même s'il ne pouvait s'empêcher de te regarder et ses lèvres de laisser aller des compliments qu'il ressentait plus qu'il ne les pensait. T'avais un truc à part. Cette aisance mêlée à cette gêne...ça te donnait un charme fou à ses yeux en tout cas.

Tu confirmas avoir apprécié ton écoute, semblant vouloir en écouter d'autres. «Je te remercie.» S'il y avait bien un truc sur quoi il ne doutait pas, c'était son talent. Alors il savait prendre ce genre de compliments. Pourtant, ce n'était pas la reconnaissance qu'il cherchait à travers sa musique. Juste d'extérioriser, juste de laisser aller ce qui venait se bloquer parfois dans sa poitrine. Il n'avait pas la chance de savoir chanter. Chez lui le processus de lâcher prise prenait des proportions d'ermitage où il s'enfermait pendant des heures pour pondre un morceau. Rien que pour ce que tu venais d'écouter il avait du mettre cinq bonnes heures...ce qui n'était pas grand chose au final, vu qu'il avait déjà passé 10h sur un titre. Il remarqua ton rire face à la possibilité de venir danser. Avec un sourire il te lança: «Ce n'est pas vraiment ton truc c'est ça?» Quelque part c'était dommage. Il avait pu percevoir ta silhouette tout à l'heure, quand tu portais encore la chemise...T'étais plutôt pas mal foutu même si t'étais un peu comme lui à ne pas te mettre en valeur, ta veste à capuche ne venant plus souligner tes bras ou encore ta taille. Il s'était détourné un instant afin de commencer à ranger ses affaires, quand il sentit ta main sur son bras. Il portait un simple t-shirt noir, sa veste en cuir reposant à côté, ce qui fait que le contact fut bref mais agréable. Ses yeux vinrent rencontrer à nouveau les tiens et il esquissa un fin sourire. «Merci pour le café.» Il te fit un clin d’œil, avant de poursuivre son rangement. C'est qu'il ne t'avait pas encore remercié à ce sujet, pouvant donner l'impression que c'était normal tout ça.

Pour la suite, il se saisit du dit café tout en écoutant la réponse à sa question. Irlandais alors? Il ne put s'empêcher d'ajouter à ça: «C'est de là que te vient ta magnifique couleur de cheveux.» Il avala la gorgée qu'il venait de boire tout en se rendant compte du cliché qu'il venait de faire. «Je suis désolé de ce stéréotype que je viens de glisser..» Son regard semblait en effet désolé, au point de se détourner un instant avant d'ajouter, le regard sur la table. «Je réfléchis rarement à ce que je dis.» Sauf quand les choses sont sérieuses, que l'autre a besoin d'écoute. Mais là, il se laissait juste aller dans ce moment. Ses yeux retrouvèrent le chemin des tiens afin de répondre à son tour: «Je suis arrivé à Chicago il y a cinq ans maintenant.» Il s'en est passé des choses depuis...la mort de son père, les "retrouvailles" avec son frère. «Je suis né en Suède, mais on a très vite voyagé à travers l'Europe surtout...» Il n'aurait pas l'audace de se plaindre de sa vie, pourtant on sentait bien que ce n'était pas parfait, malgré la vitrine que cela pouvait offrir. Il se perdait un peu dans ses pensées, avant que d'entendre ta question. «Tu me donnes quel âge?» Il venait de terminer le café, attendant de voir si tu le situais bien, si tu acceptais de deviner... Au final il lâcha enfin son âge: «25 ans depuis quelques mois.» Vous deviez avoir le même âge à quelque chose près.

Maintenant que tout était rangé, même son téléphone qu'il ne prit même pas le soin de consulter malgré la lumière clignotante, il se sentait comme dénudé face à toi. Il était assez à l'aise quand il suffisait de "faire" quelque chose, une activité, mais juste discuter...Il n'était pas vraiment habitué, il avait toujours l'impression lors de nouvelles rencontres qu'il était tout maladroit. «Qu'est-ce qui t'a mené à Chicago si c'est pas indiscret? Qu'est-ce qui t'a donné l'envie de reprendre les études aussi?» C'était bien ce genre de questions qu'on pouvait poser n'est-ce pas? Tandis que tu avais posé tes bras sur la table, il s'était naturellement retiré de cette dernière en se calant dans le fond de la banquette. Une façon de garder de l'espace entre vous afin de pouvoir mieux te regarder. Vous n'étiez pas en soirée, il se voyait mal venir replacer une de tes mèches derrière l'oreille...Tu ne lui avais qu'apporté un café après tout.

Confirmation. La danse ce n'était pas vraiment ton truc. Mais t'avais l'air de vraiment vouloir venir l'écouter - ça me touche - parce-que tu venais juste de découvrir ce qu'il fait et que tu ne lui devais rien du tout. Un coin de la pièce... «Pas trop caché j'espère, que je puisse te voir.» Vérité. Il voulait vraiment te voir pendant qu'il mixe, même si la plupart du temps il a le regard sur son ordinateur et les monitoring. Sur le coup, il ne se rendit pas compte que c'était peut-être "trop". Dès que les choses venaient du cœur chez lui, elles passaient aisément la barrière de ses lèvres. «D'ailleurs, histoire que ça puisse réellement arriver un jour.» Il sortit son téléphone de son sac, le débloqua et te le tendit. «T'accepterais de me laisser ton téléphone? Je pourrais te dire quand je joue où durant ce mois.» Cela sonnait comme une excuse pour garder le contact...même si dans le fond cela reposait sur de la praticité aussi. Pour le reste, il n'avait pas noté ton trouble. Initialement il était du genre tactile quand il se sentait à son aise, plus en intimité. Chose que vous n'étiez pas encore. Peut-être jamais, même s'il s'en voudrait de passer à côté de toi.

Banalité. Il t'avait sorti une banalité pour te complimenter sur tes cheveux. Autant ses mots pouvaient être percutant, autant ils pouvaient être tout croches, maladroits, comme cela venait d'être le cas. Cela ne se perçut pas, mais il s'en voulut sensiblement, se trouvant peu adapté aux mœurs de la société. Il trouvait que le silence lui allait mieux, même si au vue du contexte, ils ne pouvaient se regarder dans les yeux uniquement...Son regard croisa à nouveau le tien et il trouvait au final que l'idée était séduisante. Mais dans un autre endroit ce serait mieux. Il retint que ta mère était donc rousse, même si de base cela ne pouvait provenir que d'elle ou de ton père. Oui, tu en croiseras sans doute d'autres qui feront ce cliché...il n'était pas vraiment fier sur ce coup-là. Alors il préféra répondre à ta question et apprit par là même que tu as vécu en France. «Le sud de la France? Rapidement oui. Mon père se déplaçait régulièrement et il me trimbalait avec lui.» Pour pas qu'il reste en Suède avec sa mère, et surtout son frère. Ses parents avaient tout fait pour qu'il reste à distance de la violence de l'aîné. Pourtant Ruben possédait cette même rage...Il avait juste l'habitude de la tourner contre lui-même. Mais la conversation alla sur vos âges, et c'est ainsi qu'il eu un petit sourire. Oui, t'étais proche, et il entendait que vous étiez même peut-être né dans la même saison, il y a quelques mois. «Bon anniversaire en retard à toi aussi...Je me doutais qu'on était dans la même tranche.» Habitude de donner un âge aux gens...Au début c'était pour passer le temps dans les aéroports. Ruben avait toujours eu cette faculté de s'évader par des chemins peu usités, comme celui de se faire une idée de l'âge des gens.

C'est là que tu te levas, contournas la table et t'installas en face en commentant ton geste. «Sans doute oui.» Même s'il aimait que tu sois près de lui. Il ne bougea pas, tandis que tu t'avançais au niveau de la table. À cet instant, tout était dans ses yeux qui donnaient l'impression de te sonder tant il était uniquement concentré sur toi. C'est à ce moment qu'il remarqua que tu esquivais sa première question, te ruant sur la seconde. Il avait noté ton hésitation, vu également comme le dessin semblait te toucher personnellement. Tu semblais vouloir éviter d'être déçu, presque terre à terre avec tes derniers mots. C'est là qu'il te lança très sérieusement: «N'aies pas peur de rêver.» Avait-il lui-même rêvé? Pas vraiment. Pas comme on peut se l'imaginer. Mais il était clair qu'il avait cru en ses talents et qu'il avait construit son commerce, même si ce dernier n'était pas vraiment légal. Finalement il s'avança aussi, portant ses bras sur la table, son visage plus proche du tien que précédemment. «Je veux dire...La vie peut s'arrêter demain mais je crois que...nourrir ses rêves en se remettant aux études comme tu viens de le faire, ou peu importe comment, bah ça contribue à se sentir en vie...enfin je crois.» Son regard alla se perdre quelques parts vers le comptoir. Il se rendait compte qu'il n'en savait trop rien, mais cela lui avait semblé évident à te le dire. Même si pour lui se sentir en vie, lui demandait de frôler la mort. C'était l'unique stabilité qu'il avait dans sa vie, le fait de prendre des risques que certains jugeaient inutiles et dangereux.

Il laissa aussi le silence s'éprendre de vous, mais sans réellement s'en rendre compte. Mais à un moment, son regard revint vers ton visage et il nota que tu semblais absorber par sa face. Un instant il se sentit mal à l'aise...Il n'avait pas l'habitude qu'on le détaille ainsi. Frissons dans le ventre. Il ne comprenait pas. Alors il se recula à nouveau, se demandant s'il n'était pas le temps de bouger pour éviter que tu puisses continuer à le regarder ainsi... «Tu veux qu'on bouge?» Il avait soudainement envie de se fumer une clope. N'importe quoi pour lui occuper les mains et la bouche.

Rapide? Ou maladroit encore une fois? La première option était sans doute vrai. Dans son monde il était facile de tendre son téléphone à qui de droit afin d'obtenir de nouveaux contacts. Il avait un répertoire super rempli et pourtant pas grand monde avec qui discuter. C'était rare qu'on s'intéresse vraiment à sa vie, à ce qu'il pouvait ressentir. Bien souvent, on le cataloguait du côté des gars qui savent ce qu'ils veulent, alors même que c'était tout l'inverse. Il ne savait pas où il allait dans la vie. C'était ça qu'il aimait. Il faisait ce qu'il aime, même si par moment il n'en comprenait pas le sens. Sauf quand il voyait quelqu'un sourire en écoutant sa musique. Il n'aura pas tout perdu. Il récupéra son téléphone, vos doigts se frôlant au passage tout en écoutant ce que tu venais de dire. Il ne comprit pas de suite si tu regrettais de lui avoir donné ton téléphone... «Et le jour où tu travailleras plus ici, je ferai comment pour te prévenir?» Un sourire malicieux malgré le direct de ses paroles. Il essayait juste de se rattraper. Juste d'essayer de voir si t'avais vraiment envie de le revoir lui, ou si c'était juste sa musique qui t'intéressait. Respiration. Il avait besoin de s'aérer l'esprit, il commençait à en vouloir bien trop sur toi, tes intentions, ton univers.

Un univers qui lui échappait quand tu changeas de place. S'il avait hésité à te toucher, maintenant il n'en aurait plus vraiment l'occasion. Bien qu'une main cela pouvait se saisir mais...il n'avait pas l'habitude du face à face, il y avait d'un coup bien trop de projecteurs sur lui, c'était du moins la sensation qu'il avait. Quelques parts, il restait un genre d'autiste à sa façon quand on regardait son adolescence. Mais beaucoup disaient que c'était le lot de tous les adolescents...il n'en savait rien de son côté, juste que le monde de la nuit ça donnait un côté plus doux à tout. La lumière n'était jamais directe, les dialogues quasi inexistant. C'était limite à l'image d'un fond marin. Écoute. Quand tu rebondis face à ses paroles. Il se doutait que tu ne t'en empêcherais pas mais il ne savait pas...il avait eu la sensation que tu en avais en partie peur. Bref. Il n'était pas fin psychologue puis il était loin de te connaître. Tu devais savoir ce genre de choses mieux que lui et puis...Ta franchise était assez désarmante. «Je mentirais si je n'avouais pas avoir fait la même chose quand tu écoutais au casque.» Chaleur au ventre. C'était agréable de te dire ce genre de choses...qui ne se disaient pas habituellement, mais t'avais commencé...Alors t'allais pas le rejeter n'est-ce pas?

T'acceptas ta proposition et vous vous levâmes comme un seul homme. Il ajusta son sac à dos, et cala sa veste au niveau de ce dernier. Il voulait profiter du soleil qui perçait encore un peu dans la ville. Vous étiez sensiblement de la même taille ce qui était assez agréable pour suivre une discussion en pleine rue. Même si à peine arrivés à l'extérieur, lui prenait le goût d'être dans un endroit moins fréquenté. Tandis que tu t'étirais, il sortit une clope et se l'alluma, tirant dessus en fermant les yeux. Il l'appréciait en particulier celle-ci...Il souffla la fumée, tandis que ses yeux croisaient à nouveau les tiens et que tu lui demandais la destination. «Je t'avoue que j'avais juste envie de me fumer une clope...» Il eu un léger sourire, enchaînant. «puis qu'on continue à se connaître...peut-être même dans un endroit plus tranquille qu'ici...t'en dis quoi?» Il avait bien un spot qu'il aimait fréquenter quand il était seul...Mais cela n'avait rien à voir avec les coins au bord de plage. «Je ne sais si t'as l'habitude de traîner sur les toits...je connais un endroit où on a un magnifique panorama sur la ville et la mer et où je suis quasi sûr qu'on sera seuls.» Il ne se rendait pas compte que ses paroles pouvaient être effrayantes. Cette envie de se retrouver seul avec toi, alors même que vous ne vous parliez que depuis un quart d'heure, vingt minutes à tout casser. En tout cas, si t'étais partant, cela ne vous prendrait qu'une dizaine de minutes pour vous y rendre.

Rassuré. Pourquoi se sentait-il rassuré de savoir que tu avais hâte de recevoir un premier message de sa part? Encore cette foutue blessure de rejet. Il a toujours été habitué à ça, au point qu'il s'y attendait. Comme une vieille amie à qui on a l'habitude de taper la discussion. Tôt ou tard, son amant en avait marre et ne le rappelait pas. Son petit copain n'avait plus envie de se détruire avec lui, alors il se barrait. Parce-que dans le fond tout le monde était mieux que lui. Il avait compris ça depuis longtemps, mais il laissait dire ceux qui lui trouvaient un intérêt. Il n'était pas là pour juger. Il n'était pas là pour savoir qui a raison de qui a moins raison. Mais ce qui était clair ici c'est que ta simple phrase avait allégé son esprit. Sans parler de ta franchise et celle qu'il eu en retour. Si Ruben osait y regarder de plus près, il se rendrait compte que vous avez là une sacrée belle accroche. Que vous avez le même défaut quelque part, qui semblait revêtir l'allure d'une qualité dans vos regards.

Une fois dehors, il ne pensa même pas à te proposer une clope. C'était surfait pour lui. Si tu voulais en fumer une, tu lui en demanderais ou tu sortirais ton propre paquet. Il avait ses raisons de fumer depuis aussi longtemps. Sans doute sa tendance à l'auto-destruction, vu qu'il touchait de temps à autres à d'autres drogues, en majorité naturelle, bien qu'à certaine soirée il aimait à se laisser tenter par des plus chimiques. Ce qui était pratique c'est qu'il les connaissait assez bien, et savait comment son corps réagirait. Depuis qu'il avait abusé des drogues, il faisait très attention à la dépendance, et à ce jour, à part la clope, il était heureux de pouvoir dire qu'il n'avait pas besoin des autres. Si on excluait les sports extrêmes bien sûr. D'ailleurs, en marchant à tes côtés, il se demanda si ça t'intéresserait de l'accompagner en nature avec sa bagnole lancée à fond? Il chassa cette idée. Il ne te connaissait pas...à priori il n'y avait aucune raison que t'acceptes ça. «Je te rejoins. C'est fatigant la foule...Je sais la gérer que lorsque j'ai un casque sur les oreilles et que j'envoie du son.» Vu son métier il fallait qu'il apprécie un minimum les endroits bondés. «Mais dans la rue...ailleurs...si je peux me retrouver seul...ou du moins en bonne compagnie, je préfère.» Parce-qu'à l'écouter il pourrait quasi donner l'impression de préférer être seul. Mais c'était faux. En tout cas, pas actuellement.

Sourire. «J'espère que ça va te plaire, sinon on pourra aller ailleurs.» Il n'était pas du genre à se vexer pour ce genre de truc. Vous marchâmes environ cinq minutes, avant de vous engouffrer dans le hall d'un hôtel milieu de gamme. Ruben te lança un regard et un sourire emplis de malice, tandis qu'il alla appuyer sur le bouton de l'ascenseur. L'endroit était tout de même assez beau, même si ce n'était pas le dernier cri. Une fois les portes de l'ascenseur refermées, il appuya sur le dernier étage, le trente-huitième. C'est là qu'il s'adossa, son sourire toujours bien visible tandis qu'il te soufflait, ayant presque le goût de venir frôler tes cheveux: «J'espère que tu ne regrettes pas d'avoir accepté.» Un clin d’œil, avant que les portes ne s'ouvrent et qu'il vient se saisir de ta main sans réellement s'en rendre compte. Sur le coup, il ressent cette adrénaline qui le prend à chaque fois qu'il se rend dans un endroit où personne n'est sensé allé. Vous grimpez ainsi encore un étage et là il lâche ta main, sort de sa poche une épingle et se met à crocheter la serrure. Hop, un petit clic et il ouvre la porte sur une gigantesque terrasse donnant vu que Chicago et la mer d'un autre côté. Il te lance un regard plein d'excitation, tandis qu'il referme la porte calmement et qu'il se dirige vers un coin plus menu du toit. Il y a même un canapé d'extérieur, une table basse, comme il y avait également plusieurs tables de l'autre côté, celui plus large. Il déposa son sac au bas du canapé et en se tournant vers toi commence à expliquer: «J'ai découvert cet endroit il y a cinq ans...quand on venait de débarquer en ville avec mon père. Il avait voulu se la faire discret en prenant une chambre dans cet hôtel...et cette terrasse, l'hôtel ne l'ouvre que pour de grandes réceptions, des événements...le reste du temps, personne, rien!»

Il se tourna un instant vers l'horizon, sa clope finit depuis longtemps, avant même qu'il pénètre dans l'hôtel. Il respira un grand coup et te lança: «Tu vas pas me croire, mais t'es la première personne que j'amène ici.» Son regard glissa dans le tien tandis qu'il allait s'asseoir sur le canapé qui donnait vu sur l'horizon. À cette hauteur on entendait les bruits de la ville, mais de façon lointaine. «Ça te plait j'espère?» Tu t'attendais peut-être à totalement autre chose? En tout cas, clairement que vous ne serez pas dérangé. «Sinon...je ne suis pas vraiment doué en question...et je n'ai pas envie de poser des questions auxquelles t'as pas envie de répondre alors...Qu'est-ce que t'as envie que je sache de toi?» Il osa à nouveau te fixer sans craindre que tu fasses de même. À dire vrai, ça le démangeait de te toucher...mais si vous partiez par-là, il était persuadé que ça briserait tout.

Légèreté. Tu lui donnais la sensation qu'il pouvait être totalement lui-même. C'était pas courant comme sensation, simplement car habituellement ils étaient deux sur la même longueur d'ondes. Toi, il sentait que t'étais pas totalement comme lui, pourtant tu ne jugeais pas et dans l'ascenseur il a même senti que ça te plaisait. Au moins n'as-tu pas froncé les sourcils ou montré que tu t'inquiétais. C'était ça le plus beau cadeau que tu lui offrais à ce moment. Ta confiance. Alors que tu ne le connaissais pas et que tout le long de sa vie il s'est senti rabaissé par son père. Jamais assez parfait. Alors oui, sans doute est-ce pour ça qu'il t'amène sur le toit d'un hôtel après avoir crocheté la serrure au lieu de simplement aller au bord des quais. Sans doute est-ce aussi pour ça qu'il a cette tendance à toucher à ce qu'il ne devrait pas. T'étais loin de le découvrir entièrement, comme il se doutait qu'il ne voyait de toi que ce que tu voulais bien lui montrer. Mais c'était clair que si tu voulais aller plus loin, à un moment tu ne suivras pas. Ou alors il te fera du mal. Pas qu'il influence négativement, mais car il ne supporterait pas que tu le regardes autrement qu'avec cette curiosité et un genre d'envie, non? La même qu'il partageait envers toi. Il n'avait donc pas réfléchit en se saisissant de ta main. Pour pas te perdre, pour pas que tu traînes, pour te communiquer un semblant d'adrénaline comme si vous étiez des gosses au collège. Ouais, pour bien des choses il était resté un adolescent, il n'y avait pas à dire.

Il te lança un regard toujours aussi allumé à ta question: «Jamais! Parfois je me dis qu'ils le savent et qu'ils s'en moquent...ou alors ils visionnent jamais leurs vidéos de surveillance.» Il y en avait dans l'étage que vous veniez de quitter. Mais les faits étaient là, personne n'était venu le virer. À peine débarqués sur le toit il entendit ton exclamation et ça lui fit plaisir. Il n'avait jamais eu l'occasion de ramener qui que ce soit ici, simplement car il traînait rarement avec des potes...ses amants préféraient plutôt les chambres, de cet hôtel ou pas, mais pas venir contempler le coucher du soleil que vous aurez la chance de voir ensemble vu l'horaire. Quand il se dirigea vers le canapé, son regard s'écarquilla de surprise en sentant la présence de ta main dans la sienne. Il te regarda droit dans les yeux tout en acquiesçant à ce que tu lui disais là. «Pas de quoi...» C'était horrible. Il n'arrivait pas à reconnaître les signaux. À dire vrai, il ne savait pas vraiment comment se comporter dans un cadre dit amical. Si cela avait été le soir, il aurait simplement diminuer la distance entre vous et t'aurait embrassé. Mais il n'était pas en soirée. Il était clean...donc il alla s'installer sur le canapé, ne sachant toujours pas s'il devait continuer à contenir ce qu'il ressentait pour toi.

Il sourit de plus belle. Le lieu te plaisait. Pas besoin d'aller ailleurs, c'était parfait. Pour la suite, il te laissait le soin de voir ce que t'avais envie de partager. Il trouvait la démarche bien plus sincère quelque part. Faire semblant n'était pas dans ses spécialités, ou alors ça se voyait directement. Il frémit doucement au frôlement de tes doigts sur son bras. T'avais l'air de t'y connaître vu la première chose que tu lui confias. Les yeux du sorcier tentèrent de retrouver les tiens, mais ils semblaient absorber par sa poitrine avant que tu ne te reprennes. Est-ce que tu t'interrogeais sur...? La possibilité qu'il ait déconné avec sa magie? Tu pouvais savoir ça? À ses yeux t'étais loin d'un humain lambda à cet instant, mais il resta centré sur ce que tu avais à lui dire. Vous étiez tous deux calés au fond du canapé, et Ruben allongea l'un de ses bras sur ce dernier, sa main pouvant venir se perdre dans tes cheveux, mais il n'osa pas, pliant le coude afin de déposer sa tête dans sa main. «Je ne dirais pas que t'as un physique banal...» Il n'avait pu te laisser dire cela sans rebondit un minimum. Mais tandis que son regard flirta avec le tien, il se reprit: «Tu faisais quoi au Velvet? T'étais serveur genre? En tout cas, ça doit certainement être là que je t'ai aperçu la première fois.» Il n'avait pas pu t'approcher, trop occupé à faire danser la foule, ou à boire un verre au bar avant d'y retourner.

Il avait toutefois bien compris ta demande. Ton regard ne le trompait pas. «Tu connais beaucoup de sorcier?» Avait-il le chic pour ne pas répondre à ta question? Pas vraiment. Ça le titillait de connaître ton entourage...Puis ton regard clos, il décida de se laisser aller aussi, ramenant ses jambes en tailleur, tandis qu'il laissa sa tête reposer en arrière, respirant comme tu venais de le faire. Te savoir si proche faisait tout de même battre son cœur assez vite. «Je vis seul...Je pense que je serai insupportable en colocataire vu mes horaires décalés et mon côté bordélique.» Il sourit à cette annonce...Heureusement qu'il ne cherchait pas à se maquer, ça ferait fuir de suite. «Sinon je m'adonne à la musique comme tu l'as vu, j'adore aussi le code..» Il se voyait mal te dire être hacker d'entrée de jeu. «Puis j'aime l'adrénaline en général.» Chose qu'on pourrait ne pas parier s'il n'y avait eu cet épisode de venir sur le toit d'un hôtel. «Si tu te questionnes sur les runes et compagnie, t'as qu'à me poser tes questions...grâce à mon père je suis devenu imbattable...tu comprends, son fils devait être le meilleur blabla.» Il se tut soudainement. Il s'ouvrait trop. Ça devenait dangereux. Alors gardons les yeux fermés,  il se laissa glisser dans le canapé, légèrement vers l'angle afin d'adopter une position un peu plus allongée.

Mystérieux. Tu l'étais par bien des aspects. Surtout au niveau professionnel à dire vrai. Ruben avait du mal à se figurer ce que tu faisais "à l'arrière", mais ayant l'habitude que les gens restaient évasif sur leurs occupations diurnes lors des soirées, il n'alla pas fouiller davantage. Après tout, il n'allait pas de son côté te dire de but en blanc qu'il était hacker et qu'il lui arrivait de faire des choses illégales pour gagner plus d'argent. Ou encore, il n'allait pas te dévoiler qu'il aimait toucher à la drogue de temps à autres. Ce n'était pas des choses qu'on disait au premier venu, ou qu'on racontait. Ça se vivait, ça se surprenait. Au même titre que pour la musique: tu l'avais surpris à en fignoler une tout à l'heure et c'était très bien ainsi. Alors peut-être qu'un jour, si cela était vraiment important, et que vous vous connaissez encore, tu viendras à lui en parler. Ça n'avait pas vraiment d'impact pour lui actuellement. Tout ce qu'il souhaitait c'était passé du bon temps, rien de plus. Habituellement il aimait les endroits bruyants pour danser et oublier. Mais à cet instant, c'était la tranquillité du toit qu'il était venu chercher. Et il n'y avait pas à dire, avec toi à ses côtés, l'ensemble restait bien calme.

Interpellé. Tu semblais suffisamment proche, ou alors tu étais réellement digne de confiance pour que le patron du Velvet se mette à t'enseigner les runes. Au moins as-tu un à priori positif concernant les sorciers. Tu ne les crains pas, et tu sembles vouloir en connaitre davantage. «Il devait t'apprécier pour t'apprendre ainsi les runes.» Si tu n'étais qu'un employé à l'arrière...Toutefois, pas d'intentions cachées chez le suédois à cet instant. Il imaginait juste que tu étais le genre de gars que beaucoup de personnes aimaient. En tout cas, tu avais une allure et un comportement assez accessible...à priori. Contrairement à lui par exemple que beaucoup jugeaient par son apparence, et dont la spontanéité et le "je m'en foutisme" ne plaisait pas à tout le monde. Même si vous avez un style vestimentaire qui n'était pas très éloigné, les tattoo de Ruben dépotant de leurs couleurs exceptés, vous dégagiez chacun quelque chose de totalement différent. Ton calme était plus doux que celui du musicien qui était plus froid quelque part, et parfois même absent. Mais vous vous retrouviez, au point qu'il a eu envie de t'inviter dans son endroit à lui.

Alors quand le silence tomba entre vous, il n'était pas à fleur de peau. Au contraire, c'était un endroit qu'il connaissait bien, au point que sa langue s'était beaucoup trop déliée à son goût. Il n'avait pas pour habitude de parler autant de son père dans une conversation. Sans doute que le rendez-vous chez le notaire et la confrontation avec son frère y sont pour beaucoup. Au bout de quelques minutes, il commença à t'entendre bouger sur le canapé, mais il n'eu pas la curiosité d'ouvrir les yeux. L'air frais, la liberté que lui offrait l'altitude, le mettait dans un réel état de détente. Il ne comptait pas rester les yeux fermés indéfiniment, mais il se complaisait à cet instant à le faire. Il fut surpris que tu ne l'interroges sur aucune chose qu'il venait de te partager, loin de se douter que tu étais intéressé par autre chose que ce qu'il aimait ou pas dans la vie. Soudain. Il sentit ta main sur sa cuisse, et par un réflexe, il ouvrit doucement les yeux, les paupières mi-closes pour constater que tu étais penché sur lui, les lèvres proches des siennes, mais en même temps lointaines. Très lointaines vu que tu venais de déguerpir, le délaissant ainsi que le canapé! Ce qui eu tôt fait d'amener Ruben à ouvrir ses yeux totalement et à se redresser tout en restant assis.

Il contempla ta silhouette qui se découpait sur la vue. Tu lui tournais le dos, gêné - qu'il imaginait - tandis que tu expliquais ton geste. Non. Que tu t'excusais. Ruben se leva. N'est-ce pas comme ça habituellement? Il ne connait même pas le prénom quand les lèvres se rencontrent? Quand les corps s'appellent? Il découvrait ce monde. Celui qui répondait semble-t-il à des règles qu'il ne connaissait pas. Mais il nota surtout que cela te mettait dans un sale état. Un état où son regard ne pouvait plus venir soutenir tes prunelles. Les contempler au soleil avec leur éclat noisette et pétillant. Tout cela lui était désormais interdit. Alors n'écoutant que sa sensibilité - on me dit que je sens bien les gens - il s'approcha de toi dans ton dos, sans un mot - parce-qu'ils seraient maladroits, je suis maladroit - et glissa ses bras autours de ta taille, venant coller son torse à ton dos, son menton se glissant au niveau de ton épaule droite, inspirant ton odeur dans le mêlé de tes cheveux. Il ressentit un frisson le parcourir à ce geste, et il se risqua à quelques paroles au final: «Te prends pas la tête.» Son souffle dans ton cou. Ses bras t'encerclant. Quelques minutes. Assez pour qu'il apprécie le contact de ton corps contre le sien.

Il se recula. Une de ses mains se logeant dans l'une des tiennes. Son regard plus séduisant que jamais - malgré lui - tant la volupté semblait avoir pris possession de lui. Il retourna s'installer sur le canapé, t'amenant avec lui. Il se réinstalla plus ou moins comme précédemment, un bras sur le haut du canapé, créant un espace pour que tu puisses venir t'y blottir si tu en avais envie. «Tu viens t'asseoir contre moi?» Poser ta tête contre son épaule? Profiter de ces doux frissons qui parcourent peut-être aussi ton corps à son contact? Il l'espérait. Il avait envie de les sentir à nouveau de son côté. Et uniquement si tu viens à t'installer contre lui. Il osera ajouté, taquin, mais aussi pour alléger l'atmosphère: «C'est mon côté bordélique qui t'a donné le goût de m'embrasser?» Un sourire amusé sur les lèvres, il n'attendait pas vraiment de réponse à ça. Il voulait te faire entendre qu'il était bien loin d'en rester choqué, même s'il ne comprenait pas ce lien qui semblait vouloir se tisser entre vous.

Cela l'avait surpris. Ce n'était pourtant pas désagréable. Que tu veuilles l'embrasser lui prouvait que toi aussi tu ressentais un "quelque chose". Indéfinissable. Mais bon. Irrésistiblement bon. Il aurait aimé que tu poursuives ton geste. Il aurait voulu sentir la douceur de tes lèvres - t'es que douceur toi non? Contrairement à moi - découvrir la chaleur de vos souffles s'emmeler, la pression de ton corps contre le sien. Mais cela n'a pas eu lieu. Il aurait du résister face au contact sur sa cuisse. Peut être. Cela ne s'était pas passé ainsi.

Il ne connaissait pas ton passé. Le sien te restait obscure aussi. Vous ne pouviez savoir que ce terrain là vous était inconnu à l'un comme à l'autre. Pour Ruben c'était habituellement violent au début. De l'adrénaline, de l'attraction, un plongeon rapide et c'était déjà le temps de se quitter. Alors que là, quoique ce soit, cela était à la fois rapide en sensation mais lent en prise de conscience. Et il n'était pas sûr de vouloir comprendre. Il n'avait jamais eu de problème avec la confusion, le manque de formes. Après tout il n'aimait pas vraiment quand les choses étaient cadrées.

Quand il se retrouva contre toi, il remarqua comme il n'avait pas l'occasion de ce genre de geste. Simple. Et qui pourtant l'envahissait de sensations apaisantes, comme si c'était naturel d'être contre toi. Mais cela ne peut l'être, n'est ce pas? Parce que vous venez de vous rencontrer... est ce la réalité? Il se le demanda un instant. Sentir ton odeur et profiter de la brise du toit. Il n'était pas doué avec les mots, mais avec cette étreinte il espérait se rattraper.

C'est ainsi qu'il t'invita à venir contre lui. Envers qui devriez vous faire semblant après tout? Il était évident que vous vouliez être proches. Physiquement du moins. N'est ce pas tout ce qui comptait? Bien sûr, il perçut l'hésitation dans ton regard avant de venir t'asseoir, mais il était loin de se douter que tu aurais pu partir il y a encore quelques instants. Cela ne le dérangeait pas de ne pouvoir mettre de mots sur ce qu'il ressentait. Pas encore en tout cas. Doucement il posa sa main sur ton bras, tandis que ton odeur montait à ses narines.

Le soleil commençait à plonger pour à terme disparaître. Il dut légèrement froncer le regard pour que ses yeux bleus puissent en profiter. Tes premiers mots à sa boutade le firent sourire. Tu n'étais pas contraignant sur ce coup là, mais surtout tu semblais perdu. Il le sentait mais ne saurait que faire ou te dire pour te réconforter. C'est là qu'il entendit ta demande. Incompréhension. Ami? Tu te redressas alors, et ce fut comme s'il te découvrait à nouveau. Le soleil rendait tout dans ton allure percutant. Tes cheveux étaient de feu, et tes yeux d'une couleur tellement chaude...

"On sera tout ce que tu voudras." Absorbé. Par tes pommettes saillantes, par le velouté de tes lèvres, par ta chaleur. Il leva une main baguée, et la porta sur ta joue en une lente caresse qui se termina à ton menton au même moment qu'il avança son visage afin de t'embrasser avec un désir encore contenu qui laissait la place belle à une douceur presque onirique.

Cette envie que tu avais eu, il avait le goût de la poursuivre. Tant mieux si ses précédentes paroles pouvaient te rassurer. Il ne connaissait pas tes insécurités, encore moins les siennes. Il ne savait agir que par rapport à son intuition de l'instant, en suivant ses sentis, ses perceptions de ce qui ou de qui l'entourait. Cela l'amenait à être impulsif, mais aussi attentif comme présentement. Il n'était pas parfait, il te l'avait dit à sa façon, mais s'il pouvait éviter de blesser qui que ce soit, il le faisait. Sauf quand il devenait obsessif et que les émotions prenaient le dessus sur sa sensibilité mais vous n'en etiez pas là.

Quand ses yeux rencontrèrent à nouveau les tiens. Le coucher apportant une douceur partagée à vos traits. "J'espère que t'en avais toujours envie?".